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En avril 2025, les exportations horlogères suisses ont connu un spectaculaire rebond, avec une croissance de 18,2 % par rapport à l’année précédente, atteignant 2,5 milliards de francs suisses. Mais derrière cette performance se cache un moteur unique et éphémère : les États-Unis.

Un coup d’accélérateur douanier

Le marché américain, avec une envolée de +149,2 %, a représenté à lui seul un tiers des exportations du mois. Cette hausse vertigineuse n’est pourtant pas le reflet d’une demande en plein essor, mais plutôt une anticipation tactique des marques suisses face à une hausse attendue des droits de douane américains. En clair, les horlogers ont massivement expédié leurs produits avant que les barrières tarifaires ne se durcissent. Sans ce facteur exceptionnel, le mois d’avril aurait enregistré une baisse de 6,4 %.

Une croissance en trompe-l’œil

En cumul depuis le début de l’année, les exportations progressent de 4,0 %, une performance correcte mais à relativiser compte tenu de l’effet amplificateur américain d’avril. D’autres marchés clés, comme la Chine (-30,5 %) et Hong Kong (-22,8 %), continuent de se contracter, pesant sur la dynamique globale.

La montée en gamme se poursuit

La croissance s’est surtout manifestée dans le segment haut de gamme. Les montres exportées à plus de 3’000 CHF ont progressé de 22,9 %, confirmant l’attrait persistant pour les pièces de luxe, même en période d’incertitude économique. À l’opposé, les modèles d’entrée de gamme (200 à 500 CHF) ont reculé de 1,2 %.

Des matières et des contrastes

Les montres en métaux précieux (+23,4 %) et bimétalliques (+44,5 %) ont fortement contribué à la hausse de la valeur totale des exportations. En volume, c’est l’acier qui tire son épingle du jeu (+18,9 %), tandis que les modèles fabriqués à partir d’« autres matières » chutent de près de 20 %.

Des signaux à décoder avec prudence

Ce pic conjoncturel ne doit pas masquer la tendance sous-jacente : un marché international fragmenté et incertain. Si le Japon (+1,9 %) et le Royaume-Uni (+1,6 %) affichent de légères hausses, d’autres places fortes comme Singapour (-9,2 %) confirment leur fragilité.

Pour les acteurs du secteur, le défi est clair : au-delà des coups d’éclat ponctuels, il faudra renforcer la résilience structurelle face aux aléas géopolitiques et douaniers. Car en horlogerie comme ailleurs, le temps n’attend personne.

Par Eric Cosandey