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La description du mécanisme de remontoir et de mise à l’heure

LE MÉCANISME DE REMONTOIR

Le procédé le plus simple, mais non le plus pratique, pour remonter le ressort d’une montre de poche, est de faire tourner l’arbre de barillet au moyen d’une clef, ce qui oblige à ouvrir la boîte.
En 1686 déjà, on mentionnait en Angleterre un dispositif permettant d’opérer le remontage sans ouvrir la boîte. On cite également, en 1752, une petite montre exécutée par l’horloger P.-A. Caron, pour Madame de Pompadour. Cette montre se remontait par un anneau circulaire ajusté sur le cadran. Caron n’était pas seulement un excellent horloger, mais encore un musicien et homme de théâtre célèbre, connu sous le nom de Beaumarchais, auteur du Barbier de Séville et des Noces de Figaro.

Le problème du remontage de la montre, l’évolution de ce mécanisme, est une longue histoire, riche en combinaisons innombrables qui s’étendent sur un siècle et demi. Le principe moderne du remontage du ressort et de la mise à l’heure, en tirant sur la couronne, date de 1842. Cette combinaison est due à Adrien Philippe, associé de Patek, à Genève.
De tous les éléments de la montre, c’est sans doute celui-ci qui a le plus préoccupé les inventeurs. Depuis la loi fédérale suisse des brevets d’invention de 1888, il a été délivré plus de 1200 exposés d’invention visant à améliorer ce dispositif. Aujourd’hui encore, on le perfectionne dans certains détails.

En horlogerie, les solutions ne sont jamais définitives. L’introduction de la montre-bracelet et de la montre étanche a posé de nouvelles exigences, plus sévères que pour la montre de poche. Les couronnes des montres-bracelet sont petites ; on éprouve parfois de la difficulté à les tourner et à les tirer, surtout si l’on porte des gants.
Si le mécanisme demande trop de force pour tirer la couronne, la difficulté augmente et l’usure a vite fait de détraquer le système. Si, au contraire, la couronne se tire trop facilement, elle peut s’accrocher à l’habit ou à la manchette et provoquer l’arrêt de la montre. Dans les montres étanches, le passage de la tige de remontoir est un chemin propice à l’introduction des poussières, il doit donc être rendu étanche également. De ce fait, la tige de remontoir ne tourne plus aussi librement. Si elle serre trop dans son ajustement, on risque de forcer le remontage du ressort.

Le mécanisme de remontoir représenté fig. 10 est typique de toutes les montres modernes. Il peut paraître très simple à un jeune horloger et pourtant il est l’aboutissement de plusieurs siècles de recherches et de tâtonnements.

La partie la plus ingénieuse de ce mécanisme est le pignon coulant a combiné avec la bascule g et la tirette ou verrou e, fig. 11.
Ce pignon peut se déplacer sur une partie carrée de la tige t. Il est muni d’une denture latérale en forme de dents de scie qui entraîne le pignon de remontoir p. Celui-ci, dans la position représentée, fait corps avec la tige de remontoir et permet le remontage du ressort, par le rouage représenté fig. 10.

La fig. 12 montre une construction un peu différente, avec un renvoi au lieu de deux. D’autre part, elle permet de mieux comprendre comment la tirette est actionnée par la tige. Les organes sont représentés dans la position remontage du ressort. En tournant la tige, le pignon de remontoir p est entraîné par le pignon coulant a ajusté sur le carré de la tige de remontoir.

MÉCANISME DE MISE À L’HEURE

En tirant la tige t, fig. 13, la tirette e pivote et repousse la bascule g qui fait glisser le pignon coulant a. Celui-ci abandonne le pignon de remontoir p et engrène maintenant avec les renvois m.
Ces renvois commandent par engrenages la roue de minuterie n et le canon des heures u, pour la commande des aiguilles.

Dans la fig. 13, on a supprimé le pont sautoir pour ne laisser que l’extrémité du ressort sautoir s qui maintient la tirette dans sa nouvelle position. On voit que la goupille portée par la tirette e est maintenant engagée dans l’encoche inférieure du ressort s. En repoussant la tige, les organes reprennent la position de la fig. 11.

La fig. 14 montre comment s’opère la remise à l’heure des aiguilles. Les mécanismes que nous venons de décrire peuvent être considérés comme secondaires dans une montre, puisqu’ils ne jouent pas de rôle, au point de vue précision de la marche. Ils doivent cependant être fabriqués soigneusement et sur des bases de construction bien étudiées. Les engrenages d’angle, les fonctions de la tirette avec la bascule sont délicats, et tous ces organes sont soumis à des efforts relativement grands.
Les défauts les plus communs à ces mécanismes sont : l’arrachement de la tige qui provient de l’usure ou d’un défaut de construction. Pour cette raison, l’effort de traction à exercer sur la tige pour opérer la remise à l’heure ne doit être ni trop grand, ni trop petit. Si la tige sort trop facilement, surtout dans les montres-bracelet, la couronne pourrait être tirée accidentellement et rester dans la position correspondant à la mise à l’heure, ce qui provoquerait l’arrêt de la montre. Petites causes, grands effets très désagréables, qui suffisent à discréditer une montre, par ailleurs de bonne qualité.

L’ENCLIQUETAGE

L’encliquetage est un dispositif qui a pour but d’empêcher le rochet R fig. 15 de revenir en arrière, sous l’action du ressort de barillet. L’encliquetage classique représenté comprend un cliquet E (appelé aussi « masse ») muni de deux dents a et b qui peuvent pénétrer dans les dents du rochet. Lorsque le rochet tourne, dans le sens contraire à la flèche, pendant l’armage du ressort de barillet, la dent a sous l’action du petit ressort s fait déclic et laisse tourner le rochet.
Dès que l’action du remontage cesse, le rochet, en tournant dans le sens de la flèche, fait pivoter le cliquet en arrière et la dent b immobilise le rochet, mais seulement après lui avoir permis un certain recul (figure à droite). Ce recul est nécessaire, car il évite une surtension dangereuse du ressort moteur.

On a construit, en horlogerie, une grande variété d’encliquetages, mais ce modeste mécanisme tend vers une forme d’exécution classique, aussi simplifiée que possible. On demande d’un cliquet qu’il soit robuste. Le petit ressort s est l’unique organe délicat. Il est généralement formé par un fil d’acier (ressort ficelle), pour faciliter, lorsqu’il doit être remplacé, le travail du rhabilleur.
La suppression générale de l’arrêtage au barillet exige un recul suffisant du cliquet ; c’est tout ce qu’on lui demande. Dans les anciennes montres, le constructeur mettait un peu de fantaisie (comme pour la raquette) pour réaliser des formes harmonieuses ou décoratives, avec surfaces et angles polis. On est plus sobre actuellement, et on donne plus d’importance à la fonction qu’au coup d’œil.

L’AJUSTEMENT DES AIGUILLES

Dans les montres ordinaires, l’ajustement des aiguilles est souvent réalisé de façon sommaire. Dans une montre de bonne qualité, c’est une partie de la montre qui demande beaucoup de soin, aussi bien dans la construction que dans l’exécution.
La fig. 16 montre comment ce dispositif doit être réalisé pour remplir correctement son but. Pendant la mise à l’heure, les aiguilles doivent pouvoir tourner facilement, sous l’action de la tige de remontoir, mais elles doivent aussi être entraînées sûrement, pendant la marche de la montres. Cela veut dire que la chaussée D doit être ajustée « à frottement gras » sur la tige de la roue de centre. Si l’ajustement est trop dur, l’effort des engrenages (pignon coulant-renvois-minuterie) est trop grand. L’usure est rapide et, lorsqu’on tourne les aiguilles en arrière, la roue d’échappement (tournant également en arrière) peut endommager les palettes en rubis de l’ancre. Si les palettes sont en grenat ou en saphir, le danger est plus grand encore. Il s’agit d’un dosage très délicat du frottement de la chaussée sur la tige du pignon.
D’autre part, les aiguilles doivent posséder chacune un canon (A et C) bien ajusté sur la chaussée D et le canon des heures B.

La fig. 16 montre que l’ébat d’aiguilles en hauteur est limité par l’extrémité B du canon des heures et le canon A de l’aiguille des minutes. Il est important que, lors d’un démontage, les aiguilles reprennent toujours la même position stable. On évite des crochements d’aiguilles et des causes d’arrêt. Ajoutons encore que les mobiles qui commandent les aiguilles doivent avoir des dentures bien calculées, avec de petits ébats des dents entre elles, pour éviter les ébats d’aiguilles dans le sens de leur rotation. De trop forts ébats d’aiguilles dans ce sens enlèveraient toute précision dans la position de l’aiguille des minutes.

LE REMONTAGE AUTOMATIQUE

La montre à remontage automatique utilise les mouvements du corps pour opérer un remontage lent et presque continu du ressort de barillet. Les premières montres de poche à remontage automatique furent réalisées par l’horloger loclois Abraham-Louis Perrelet, vers 1780 (ndlr : sujet à caution). Elles furent perfectionnées peu après par Abraham-Louis Breguet.
Pour la montre de poche, les secousses utilisées pour le remontage proviennent essentiellement de la marche. Ce système de montres ne fut jamais fabriqué en grandes quantités. C’était plutôt une fantaisie qu’une montre de réelle utilité. Pourtant, l’idée du remontage automatique ne cessa pas de préoccuper les inventeurs.

En 1923, la maison anglaise Hardwood reprit la solution du remontage automatique, pour la montre-bracelet. Ce fut alors l’étincelle qui provoqua rapidement des recherches, en vue d’améliorer et de simplifier ce type de mécanisme, encore bien imparfait.
Actuellement, la montre à remontage automatique a fait ses preuves. Elle subira sans doute encore quelques perfectionnements de détails, mais le principe appliqué est bon, et nous dirons plus loin pourquoi cette montre peut être considérée comme la montre de l’avenir.

En général, l’homme est conservateur, il n’accepte pas volontiers de modifier ses habitudes et ses opinions. De nombreuses personnes estiment encore que le remontage journalier de la montre est en somme une opération agréable qui marque l’heure du repos et la fin d’une journée. C’est une petite habitude, comme celle d’effeuiller le calendrier ou de « tapoter » le baromètre.
Cependant tous ceux qui se sont décidés à porter une montre à remontage automatique ont été vite conquis par l’agrément de ce nouveau mode de remontage. Il libère complètement l’esprit de cette obligation du remontage journalier. Ceux qui ont eu des déboires avec ce genre de montres ne doivent pas mésestimer le système, mais plutôt admettre qu’ils n’ont pas su choisir la montre de bonne qualité.

La montre à remontage automatique ne supporte pas une exécution grossière. Bien conçu, ce système de remontage n’est pas du tout délicat. Si nous avions à faire une différence entre les divers systèmes de remontages automatiques, nous admettrions deux classes :

1. Le remontage s’opère par la rotation d’un volant dont la course est limitée à un peu plus d’un quart de tour. Le volant ne remonte le ressort que lorsqu’il tourne dans un sens. Dans l’autre sens, il n’y a pas de remontage et cette course peut être considérée comme perdue. Malgré cela, le remontage est largement suffisant..
2. Le volant n’est pas limité dans sa course. Il peut faire des tours complets dans un sens comme dans l’autre et toutes les rotations provoquent un remontage du ressort. Ce système utilise naturellement beaucoup plus complètement toutes les secousses et les mouvements du bras. Sans nous attarder à des détails de construction, voyons le principe adopté pour ce système de remontage.
Un volant V (fig. 17), qui pèse de 10 à 25 gr., pivote librement dans des rubis, au centre du mouvement. Les déplacements de ce volant sont limités par des butées à ressort b. Au centre du mouvement, le volant porte un organe denté Z1 qui engrène avec une portion de crémaillère Z2 munie d’un cliquet C1 qui fait tourner le rochet Z3, chaque fois que le volant tourne dans le sens de la flèche. Un cliquet de retenue C2 empêche le rochet Z3 de revenir en arrière.
Sous le rochet Z3 se trouve un pignon (non visible sur la figure) qui actionne la couronne Z4 et finalement le rochet Z5, ajusté sur l’arbre du barillet. Le rouage est calculé de telle façon que lorsque le volant fait 1/3 de tour, il fait tourner le rochet du barillet de seulement 1/100 de tour environ.
Le remontage du ressort s’opère dans ces conditions très lentement ; mais comme le volant est presque toujours en mouvement, la montre marche peu après qu’on l’a mise au poignet. Après quelques heures, le ressort est complètement armé. Si, à partir de ce moment, le ressort continuait à se remonter, il en résulterait une surtension qui ferait « rebattre » le balancier.

On évite ce grave inconvénient en crochant le ressort r (fig. 18) à une bague a dont l’épaisseur est bien calculée, de façon qu’elle puisse glisser contre les parois du tambour de barillet, dès que la tension, du ressort atteint une certaine limite. On évite de cette façon toute surtension du ressort et, lorsque celui-ci est complètement armé, la marche de la montre est assurée pour 36 heures, même lorsqu’elle est enlevée du poignet et mise au repos.

Avec une telle réserve de marche, il ne serait pas nécessaire de conserver dans ce genre de montres le mécanisme habituel de remontage à la main. On doit cependant conserver la tige de remontoir et sa couronne pour la remise à l’heure des aiguilles.
Dans une montre bien construite, le volant n’est ni trop lourd, ni trop léger, son poids est calculé pour avoir juste la force nécessaire à l’armage complet du ressort. Dans les montres à remontage automatique où la course du volant n’est pas limitée, la présence des deux butées à ressort n’est plus nécessaire et il est possible d’opérer le remontage avec un volant plus léger.
Ce type de montres possède un volant qui permet d’utiliser la presque totalité des mouvements du bras, aussi est-il possible de réduire le remontage du barillet à 1/200 de tour environ pour 1/3 de tour du volant.

Ce mécanisme est assez sensible pour qu’une telle montre se remonte encore complètement lorsqu’elle est dans une poche. C’est évidemment la montre-bracelet qui a provoqué le succès du remontage automatique, grâce à l’ingéniosité des constructeurs. Cette solution mécanique, aujourd’hui si parfaite, trouvera certainement d’autres applications dans tout appareil soumis à des chocs ou des trépidations, ou même de très petits déplacements. La montre à remontage automatique vit des gestes et des mouvements de son propriétaire. Cette source d’énergie est bien préférable à celle d’une pile ou d’un accumulateur.
Dans certaines constructions du début, les mouvements du volant provoquaient au poignet de petits chocs que les personnes délicates trouvaient désagréables. Cet inconvénient n’existe plus dans les bonnes constructions modernes.

Remarquons, pour terminer ce chapitre, le gros avantage que présente le remontage automatique. Pendant toute la journée, le ressort est complètement, ou presque complètement armé, tout au plus se désarme-t-il un peu pendant la nuit. La force motrice peut donc être envisagée, pratiquement, comme constante et toujours au maximum. De ce fait, l’amplitude des oscillations du balancier peut être maintenue au maximum. Ceci représente un élément très favorable à la bonne marche de la montre et à la stabilité de la marche. Ce fait a été vérifié pendant bien des années sur des montres de bonne qualité. Indépendamment des avantages du remontage automatique, cette amélioration des qualités du réglage sera, probablement, le facteur principal qui assurera le succès durable de la montre à remontage automatique.

Partie 3